Michel Kemper dans le chorus en parlant de David Lafore Cinq Têtes a écrit :David LAFORE CInq Têtes
Babines - Plat à Gratin - Le jour presque le plus long - Sur ma mule - Le coeur de pitre - Fleur de Rond-point -Nuit Blanche - Bye-bye - Petit oui - Herbe Rouge - Mouches - Au feu - Au fond du temps - Annexe : Bye bye long
(52'46 - In D/Pias France)
S'il y a un potentiel tube en cet album, il sera à cheval entre le plébiscite d'adultes et l'amusement d'enfants : à l'évidence,
Sur ma mule entrera dans l'anthologie des chansons dada, au moins dans l'idée quelque peu surréaliste de ce titre aussi abscons que franchement cahotant. Qui n'est du reste pas le seul en ce premier vrai disque de David Lafore "Cinq Têtes" : entendez par là le Marseillais qu'il est et son quintet (auquel s'adjoint ici un quatuor à cordes). Un disque dont le permanent tempo n'est rien qu'un trot (ça fait jazzy-rock-western). Sans en faire trop, ni trop peu : sobre tant dans l'interprétation que dans la réalisation soignée d'Alain Cluzeau [ndmoi : le même réalisateur que bénabar

].
Ce qui frappe et séduit chez Lafore, c'est ce constant décalage entre une apparence sérieuse et des propos qui tiennent à hue et à dia. Comme cette trompeuse pochette [ndmoi : voir plus bas

] qui - par sa typographie et sa maquette élégante - fait dans le classieux. Qui tente, par son visuel, de nous vendre un artiste aux allures responsable, mais toussant au verso pour mieux ruiner la première impression. Car Lafore est la constante démesure de l'absolue dérision. C'est un pince-sans-rire, un caustique adepte du contrsens. Ourlant du futile qui, par lui, se mue en de bien jolies chansons, et ajoutant de singulières pièces au bestiaire chanté : à la mule déjà citée s'adjoignent des
Mouches pompeunneuses de gland !
L'art de Lafore s'affiche particulièrement dans
Le Coeur du pitre (rien que le titre.. pourtant prélevé aux
Poésies de Rimbaud) : "
Mon coeur volé pend à la poutre / Il s'y balance et tachycarde / Mon coeur volé pend à la poutre / Et trace un drôle de cardiogramme..." Qui témoigne d'un gtrand soin d'écriture, la tendresse comprise (
Au fond du temps en est bel exemple), que l'on retrouve sur l'ensemble des titres. Que ce joyeux iconoclaste perfore de pitreries - sans doute pour masquer une trop grande sensibilité, une pudeur exemplaire.
Il ne serait pas étonnant que, par cet album remarquable, Lafore se taille un joli nom dans nos réflexes chanson.
Michel KEMPER