Petit bilan d'une année 2009 riche de 172 films
(pas seulement des films de 2009; j'ai vu également 2 films de 2009 en 2010); riche aussi de rencontres inespérées...
Les meilleurs films de 2009 (pour moi) pour commencer...













1. EYES WIDE OPEN (EINAYM PKUHOT/TU N'AIMERAS POINT) d'Haim Tabakman
Evidemment
Eyes Wide Open...
Le film le plus vu en 2009... et de loin
(9 fois - je n'ai pas réussi à faire mieux; j'aurais bien voulu pourtant...).
Un film plus beau et plus déchirant à chaque vision, un cinéaste qui filme le désir comme on ne l'avait plus filmé depuis longtemps, deux acteurs en état de grâce : le miracle de l'année.
2. DAS WEISSE BAND (LE RUBAN BLANC) de Michael Haneke
Une Palme d'Or incontestable. Un film exceptionnel, d'une richesse et d'une profondeur rares.
Combien de cinéastes sont capables aujourd'hui de réaliser un tel film ?
3. INGLOURIOUS BASTERDS de Quentin Tarantino
Un film que je suis allée voir avec un peu d'appréhension, connaissant les libertés prises par Tarantino avec l'Histoire, la question étant : est-ce que ça "passe" ou non ? Eh bien oui, ça passe, et magnifiquement. Ce pourrait être insupportable ou raté, ou les deux : c'est brillant et profond, divertissant et émouvant. En bref, un grand film.
Mais comment Tarantino a-t-il pu couper les scènes de Maggie Cheung ???
Et prendre Léa Seydoux pour lui faire faire de la figuration...
(alors qu'elle aurait été parfaite pour le rôle de Shosanna...).
4. THE WRESTLER de Darren Aronofsky
Le film de la "renaissance" de Mickey Rourke. C'est filmé parfois comme un film des Dardenne, c'est par moments d'une violence inouïe (les scènes de catch...), c'est noir et magnifique à la fois. Le film est sans doute inégal, mais il bouleverse. Un choc.
5. VINCERE de Marco Bellocchio
C'est un film d'une ampleur, d'une puissance, d'une richesse sidérantes. Un film historiquement passionnant, cinématographiquement époustouflant, bourré d'audaces formelles et narratives. Bouleversant.
6. FROST/NIXON de Ron Howard
Si on m'avait dit que j'irais voir un jour un film de Ron Howard, je ne l'aurais pas cru. Si on m'avait dit que Ron Howard était capable d'une telle réussite (avec un scénario de Peter Morgan tout de même : ça aide...), je ne l'aurais pas cru non plus.
Un film brillant et captivant qui ne cesse de monter en puissance jusqu'à atteindre les sommets. Indispensable.
7. MILK (HARVEY MILK) de Gus Van Sant
Un film magnifique, assez classique dans la forme, mais bouleversant. Parce que ce que raconte le film, ce n'est pas rien. Les combats d'Harvey Milk bouleversent encore aujourd'hui - d'autant plus que l'homophobie existe encore, même s'il y a eu des progrès...
Dommage, tout de même, que Gus Van Sant ait raté la scène la plus importante (?) du film : l'assassinat de Milk, filmé de manière trop insistante. En montrer moins n'aurait rien retiré à la force du film - au contraire ?
Si vous voulez voir le "vrai" Harvey Milk, je vous recommande le formidable (mais trop court) documentaire réalisé par Rob Epstein en 1984 : The Times of Harvey Milk.
J'aime le Harvey Milk incarné (superbement) par Sean Penn : j'aime encore plus le "vrai" Harvey Milk, son sourire (comment résister à un sourire pareil ? Sean Penn ne peut pas rivaliser...), son rayonnement, son charisme...
8. WELCOME de Philippe Lioret
Welcome est l'histoire d'un jeune Kurde prêt à tout (y compris à risquer sa vie) pour rejoindre l'Angleterre et celle qu'il aime. Et l'histoire d'un homme qui, par amour, cesse d'être lâche, de fermer les yeux. Et c'est magnifique.
C'est ce qu'on appelle une très belle surprise. On n'imaginait pas Philippe Lioret capable d'une telle réussite. Un très beau film, terriblement émouvant (la fin est d'une tristesse inimaginable...), terriblement humain.
9. JAFFA (KALAT HAYAM) de Keren Yedaya
C'est une histoire d'amour comme les autres. Enfin non, pas tout à fait comme les autres... Mali et Toufik s'aiment depuis des années et préparent leur mariage. Mais Mali est israélienne et Toufik palestinien...
Un film bouleversant sur l'une des plus grandes tragédies modernes, le conflit israélo-palestinien en l'occurrence, sur son absurdité, sur tous ces drames personnels qu'il engendre et sur l'espoir qui peut naître parfois au milieu de la tragédie...
L'un des grands films de l'année.
(D'accord, il y a un peu trop de zooms...)
10. LES HERBES FOLLES d'Alain Resnais
Un film imparfait, un peu déconcertant, mais avec des trouvailles qui enchantent. En plus, c'est drôle et superbement filmé.
11. LONDON RIVER de Rachid Bouchareb
Elisabeth Sommers vit à Guernesey. M. Ousmane vit en France. Ils se rencontrent à Londres, alors qu'ils sont sans nouvelles de leurs enfants depuis les attentats du 7 juillet 2005...
Un très beau film, qui pourrait être édifiant (la rencontre entre deux personnes que tout sépare, notamment leurs religions : Elisabeth est chrétienne, M. Ousmane musulman...), mais qui évite tous les pièges et émeut profondément.
12. TAKING WOODSTOCK (HÔTEL WOODSTOCK) d'Ang Lee
Deux heures qui passent comme un rêve. Enthousiasmant, joyeux, émouvant, magnifiquement filmé : que demander de plus ?
13. LA FILLE DU RER d'André Téchiné
Une jeune fille raconte à la police qu'elle a été agressée par des individus qui la croyaient juive. Sauf qu'elle a tout inventé...
Le film, inspiré d'un fait divers, n'est pas le meilleur de Téchiné (il bouleverse moins que le précédent... forcément) - parce que son héroïne n'est pas si intéressante que ça notamment ?
(et puis Catherine Deneuve en garde d'enfants, on y croit moyennement...). Un Téchiné mineur, mais un film tout de même formidable.
14. LES TROIS SINGES (ÜÇ MAYMUN) de Nuri Bilge Ceylan
Le meilleur film de Nuri Bilge Ceylan (sur les trois que j'ai vus du moins). C'est que pour la première fois, Nuri Bilge Ceylan nous raconte
vraiment quelque chose. Et ça change tout ! Nuri Bilge Ceylan ne se contente pas ici de "fabriquer" des images somptueuses, de créer un univers, une atmosphère : il nous raconte une histoire saisissante (un homme politique, pour ne pas perdre une élection, demande à son chauffeur, contre de l'argent, d'endosser la responsabilité de l'accident (mortel) qu'il a provoqué...), filme des personnages mémorables, dont un très beau personnage féminin, Hacer, interprétée par la magnifique Hatice Aslan. Et si Nuri Bilge Ceylan était finalement un (très) grand cinéaste ?
15. NON MA FILLE TU N'IRAS PAS DANSER de Christophe Honoré
Trois réussites exceptionnelles à la suite (
Les Chansons d'Amour,
La belle personne et ce nouveau film) : Christophe Honoré est décidément un cinéaste avec lequel il faut compter.
(D'accord, le conte breton n'était peut-être pas indispensable, mais bon...)
16. BOY A de John Crowley
Un jeune homme sort de prison et commence une nouvelle vie sous un autre nom. C'est qu'enfant, "Jack" a commis un acte terrible. Comment vivre avec "ça" ?
Il y a dans le film des partis pris de mise en scène un peu curieux parfois et le scénario a sans doute quelques défauts. Mais c'est un film remarquable, fort, très fort. Et inévitablement dérangeant. Le film nous met en face d'une réalité (d'une énigme ?) terrifiante : comment des enfants peuvent-ils tuer un autre enfant ???
17. FISH TANK d'Andrea Arnold
L'une des très belles surprises de l'année. Ce pourrait être un énième portrait d'adolescente paumée (c'est l'impression que donne le début du film), un film social de plus, mais à l'arrivée, c'est beaucoup plus que ça. Le film prend des chemins inattendus, est formellement magnifique et, au bout du compte, impressionne.
18. LOS ABRAZOS ROTOS (ÉTREINTES BRISÉES) de Pedro Almodóvar
Le début est un peu laborieux, la fin un peu faible, mais au milieu, c'est formidable.
Un Almodóvar mineur (?) sans doute, mais le niveau reste élevé.
19. AMREEKA (AMERRIKA) de Cherien Dabis
Muna et son fils quittent la Cisjordanie pour les Etats-Unis, où ils vont pouvoir commencer une nouvelle vie. Mais ce sont de nouvelles humiliations qui les attendent. C'est que nous sommes en 2003. Les Etats-Unis ont envahi l'Irak et tout ce qui ressemble de près ou de loin à un Arabe est un terroriste potentiel...
Un beau film, cruel (Muna a quitté une humiliation pour une autre, une violence pour une autre), généreux (un peu trop ? - mais un film peut-il être trop généreux ?), émouvant, qui se termine (heureusement) sur une note d'espoir.
20. THE TIME THAT REMAINS (LE TEMPS QU'IL RESTE) d'Elia Suleiman
Le film se déroule sur quatre époques - 1948 (au moment de la création de l'Etat d'Israël), 1970, 1980 et aujourd'hui - et s'inspire de la vie de la famille d'Elia Suleiman. En 1948, le père d'Elia Suleiman, Fuad, était un jeune résistant palestinien...
Le film est imparfait sans doute (le début manque un peu de "lisibilité" ? il y a quelques temps morts ?), mais c'est un film formidable, avec cet humour si particulier, pince-sans-rire, mais souvent ravageur, que l'on aime chez Suleiman, un film qui finit par toucher profondément. Le film aurait pu être plus émouvant encore ? Peut-être, mais qu'importe...
Les acteurs de 2009, ceux qui m'ont le plus touchée ou éblouie (liste non exhaustive)...
D'abord, trois acteurs miraculeux...
Mickey Rourke dans
The Wrestler bien sûr. Ce que fait Mickey Rourke dans ce film - physiquement, émotionnellement - est tout simplement énorme...
Qui d'autre aurait pu faire ce qu'il fait ici ?
Evidemment
Zohar Strauss et
Ran Danker dans
Eyes Wide Open. Ils bouleversent tous les deux
(et encore, "bouleversent" est un mot bien faible...).
Ran Danker fait plus que bouleverser : il est affolant. Il a tout pour lui : la beauté et la profondeur, la grâce et la sensibilité, la sensualité et une intelligence de jeu très fine
(pas mal pour un acteur qui est à l'origine un acteur de soap...). Le coup de foudre/coup de cœur de l'année.
(En plus, il a la même grâce quand il chante; enfin, je trouve...
).
Des acteurs ou actrices qui ont marqué l'année 2009, il y en a d'autres.
Giovanna Mezzogiorno dans
Vincere.
Frank Langella, le Richard Nixon de
Frost/Nixon.
Sean Penn dans
Milk.
Dana Ivgy et
Ronit Elkabetz dans
Jaffa.
Ronit Elkabetz qu'on a vue aussi dans
La Fille du RER d'André Téchiné et
Cendres et Sang de Fanny Ardant - et aussi
Zion et son frère d'Eran Merav.
Golshifteh Farahani et
Taraneh Alidousti dans
A propos d'Elly... d'Asghar Farhadi.
Vincent Lindon dans
Welcome. L'a-t-on déjà vu comme ça ??? Aussi fragile, aussi bouleversant, aussi désarmant ?
Yvan Attal dans
Rapt de Lucas Belvaux.
Michel Piccoli dans
Le Bel Age de Laurent Perreau.
Sotigui Kouyaté dans
London River.
Kristin Scott Thomas dans
Partir de Catherine Corsini.
Chiara Mastroianni dans
Non ma fille tu n'iras pas danser.
Michael Fassbender dans
Fish Tank et
Inglourious Basterds.
Peter Mullan dans
Boy A.
Gérard Depardieu dans
Bellamy de Claude Chabrol.
Louis-Do de Lencquesaing qui, dans
Le Père de mes Enfants, réussit, comme sa réalisatrice, Mia Hansen-Løve, l'impossible : ressusciter - librement dans les faits, mais fidèlement dans l'esprit - la figure flamboyante et bouleversante d'Humbert Balsan.
Deux jeunes comédiennes prometteuses :
Pauline Etienne dans
Le Bel Age.
Alice de Lencquesaing dans
Le Père de mes Enfants, où elle joue... la fille de son père.
En 2009, on a aussi revu
Guillaume Depardieu dans un film qui n'a pas tenu toutes ses promesses :
Au voleur de Sarah Leonor, mais dans lequel il était magnifique.
Les plus belles scènes, les plus fortes, les plus étonnantes / les plus beaux plans / les plus belles idées de cinéma de l'année...
Le premier baiser dans la chambre froide dans
Eyes Wide Open.
Toujours dans
Eyes Wide Open (mais je crois que je pourrais vous citer dans cette rubrique quasiment toutes les scènes d'Eyes Wide Open...
) :
Le plan qui précède l'apparition d'Ezri (Ran Danker) au début du film : ce chapeau tombé à terre qui semble sortir de nulle part
- et puis bien sûr, juste après, l'apparition d'Ezri elle-même...
Ce bus sur lequel se reflète furtivement
le contrechamp de la scène que nous sommes en train de voir...
La petite phrase qui ne dit rien... mais qui dit tout (et qui déchire le cœur...) : le "Je sais"
(en VO et en phonétique : "Ani iodea", je crois) d'Ezri à la fin du film.
Et tous les gros plans (ou presque) de Ran Danker, qui sont d'une beauté sidérante (c'est bien simple, on dirait que le gros plan a été inventé pour lui...).
Un petit garçon qui découvre la réalité de la mort dans
Le Ruban Blanc (pour voir la scène, c'est ici).
Bien sûr, la vision d'Ida Dalser (Giovanna Mezzogiorno) escaladant les barreaux et jetant des lettres dans la neige dans
Vincere.
Le discours de Mickey Rourke à la fin de
The Wrestler.
Elia Suleiman qui, dans
The time that remains, franchit le Mur de Séparation israélien... avec une perche...
La plus belle fin de l'année : celle de
Jaffa.
La fin la plus intrigante : celle des
Herbes Folles.
Le personnage le plus exaspérant de l'année : Le Samson de
Samson & Delilah, le premier film de Warwick Thornton, l'un des films les plus surestimés de l'année - avec
Public Enemies de Michael Mann.
L'engouement (l'aveuglement ?) critique (quasi-)unanime qui m'a laissée perplexe en 2009 : celui qui a accueilli
Un Prophète de Jacques Audiard, que je suis allée voir en me disant que c'était peut-être LE film de l'année et qui, au bout du compte, ne m'a convaincue ni sur le fond, ni sur la forme. Et qu'on ne me parle pas d' "ascension sociale" (j'ai beaucoup entendu ou lu cette expression) à propos du parcours du héros du film... Une ascension sociale ??? C'est l'histoire d'un petit voyou qui devient un criminel !!! Un grand film sur la prison, sur la criminalité ? Mais qu'apporte-t-il vraiment ? qu'a-t-il de si original ? de si révolutionnaire ?
La chanson de l'année (au cinéma) : The Wrestler de Bruce Springsteen .
En 2009, j'ai vu beaucoup de films de 2009... et beaucoup d'autres films. Parmi ceux-ci, un choc absolu, un film qui ne ressemble à aucun autre, un monument, autrement dit celui-ci :
En 2009, il y eut aussi de (très) belles rencontres...
L'une des plus courtes, mais aussi l'une des plus intenses :
Woody Allen (accompagné d'
Evan Rachel Wood, ce qui ne gâte rien...) le 19 juin pour l'avant-première de
Whatever Works.

Une grosse émotion. Et entendre Woody qui vous dit "merci"
(en français qui plus est), c'est énorme...
Pour les images, c'est ici...
Grand moment également le 26 février : une rencontre avec
Dustin Hoffman et
Emma Thompson (quand même...).
Grosse émotion aussi, le 24 mai, avec
la Master class de
Gérard Depardieu au Forum des Images. Un Gérard Depardieu bouleversant, brillant, généreux, largement à la hauteur de sa réputation.
Et je ne sais combien de jours pour s'en remettre (pour moi...).
Parmi les autres grands moments de l'année :
Evidemment la rencontre avec
Francis Ford Coppola le 11 novembre au Forum des Images
(il se passe beaucoup de choses au Forum des Images...). Un Coppola incroyablement disponible et enthousiaste. Un enchantement.
Elia Suleiman le 16 juillet pour l'avant-première de
The time that remains (vous avez des images ici). Autant il est impassible ("keatonien") dans ses films, autant dans la vie... pas du tout...
(Ah ! Elia Suleiman et son bermuda : "I thought it was nice..."
)
La Master class de
Claude Chabrol le 4 février... au Forum des Images.
Les autres belles rencontres du Forum des Images :
Bertrand Tavernier (vu 5 fois, mais on ne s'en lasse pas...)
Lucas Belvaux (que j'ai vu ailleurs aussi...)
Jacques Doillon (magnifique...)
Eytan Fox (3 jours de suite et avec bonheur)
Ronit Elkabetz et
Keren Yedaya (Ah ! Ronit Elkabetz...)
Valeria Bruni Tedeschi et
Noémie Lvovsky
Isabelle Huppert
Autres belles rencontres de 2009 :
André Téchiné (vu 2 fois)
Christophe Honoré et
Chiara Mastroianni
Jean-Pierre Léaud
André Dussollier et
Anne Consigny
La déception de l'année pour ce qui est des rencontres (car il y a tout de même une déception) : Amos Gitai, que j'ai trouvé... glaçant.
La comparaison avec Eytan Fox et Francis Ford Coppola, vus quelques jours plus tôt, n'a pas dû jouer en sa faveur... Ou alors, il était dans un mauvais jour...
Et puis en 2009, bien sûr, il y a eu les mauvaises nouvelles, comme la mort, à 30 ans, de Jocelyn Quivrin...
En 2009, Manoel de Oliveira a eu... 101 ans.
Et en 2009, on s'est demandé ce qu'il pouvait bien se passer dans la tête de Joaquin Phoenix...