IL Y A LONGTEMPS QUE JE T'AIME de Philippe Claudel
Premier film réalisé par Philippe Claudel,
Il y a longtemps que je t'aime aborde un sujet impossible (?) : le retour à la vie, à la liberté, après quinze ans de prison, d'une femme et comment on peut vivre - elle, les autres, ceux qui savent surtout - avec « ça ». Comment aborder un tel personnage, qui a quelque chose d'un monstre
(surtout quand on apprend ce que Juliette a fait) ? Le film explore notamment les relations entre Juliette et sa jeune sœur, Léa. Elles ne se sont pas vues pendant des années et réapprennent à se connaître...
Beau film, dérangeant, complexe, âpre, qui suscite forcément en nous des questions - à la place de Léa, on ferait quoi ? on se comporterait comment ? La fin du film apporte une révélation bouleversante
(quelque chose qu'aurait peut-être dû révéler l'enquête à l'époque des faits ? je ne suis pas sûre que ce soit complètement crédible qu'on ne l'ait pas découvert à l'époque...).
Beau film donc, assez classique formellement, servi par une magnifique distribution, dans les premiers rôles, Kristin Scott Thomas et Elsa Zylberstein, ou les seconds, Laurent Grevill, Frédéric Pierrot ou Jean-Claude Arnaud, l'acteur qui joue le beau-père aphasique d'Elsa Zylberstein.
(Par contre, il y a une gamine un peu tête à claques...
)
THE DARJEELING LIMITED (A BORD DU DARJEELING LIMITED) de Wes Anderson
Après un film -
La Vie Aquatique (en VO :
The Life Aquatic with Steve Zissou
- pourquoi The Life Aquatic et non The Aquatic Life d'ailleurs ?), le seul que j'avais vu auparavant de Wes Anderson - qui atteignait (à mon avis) des sommets dans le je-m'en-foutisme et la désinvolture (c'est-à -dire que c'était un peu n'importe quoi !), voici
The Darjeeling Limited, soit l'histoire de trois frères qui se retrouvent en Inde pour un « voyage spirituel » (qui sera bien plus que ça) environ un an après la mort de leur père
(Num a déjà raconté l'histoire, je sais...
), et là , c'est un petit miracle ! Voilà un film d'un charme dingue (un charme en même temps difficile à analyser), un film qui a la grâce, un enchantement d'un bout à l'autre (dès le prologue parisien, où la présence de
(la sublime) Natalie Portman est déjà un bonheur en soi - mais Jason Schwartzman enchante également). D'où vient la grâce du film ? D'un récit tout en fluidité et en poésie (même dans l'incongruité) ? D'une mise en scène lumineuse ? Du charme de ses acteurs ? Adrien Brody et Jason Schwartzman
(au charme moins évident a priori ?) en particulier - plus Natalie Portman. Je suis moins convaincue par Owen Wilson. Belles apparitions, par ailleurs, d'Anjelica Huston (plus qu'une apparition en ce qui la concerne) et de Bill Murray. On a même droit à Barbet Schroeder en garagiste ! Sans oublier une bande originale où se côtoient, notamment, musiques des films de Satyajit Ray, The Kinks et... Joe Dassin !!!
Alors voilà , c'est à la fois léger et profond, incongru et émouvant. En bref : c'est magnifique.
LE NOUVEAU PROTOCOLE de Thomas Vincent
Un homme apprend la mort accidentelle de son fils. Une jeune femme lui parle des médicaments expérimentaux que prenait son fils. Ces médicaments sont peut-être responsables de sa mort...
Le Nouveau Protocole est un excellent film, qui est à la fois un drame humain et un thriller presque à l'américaine... peut-être un peu trop à l'américaine. C'est prenant, c'est souvent poignant, c'est très bien filmé, très bien joué par Clovis Cornillac, humain et puissant, et Marie-Josée Croze, magnifique comme toujours dans un personnage dont on ne sait pas toujours quoi penser (ce qui est plutôt bien). C'est peut-être un peu simpliste parfois (dans la dénonciation de certaines pratiques des laboratoires pharmaceutiques) ? Dommage surtout que la fin
(à Davos) - un peu ratée, ambiguë - vienne gâcher in extremis le film. Mais cela ne retire rien des qualités de tout ce qui a précédé. Le film perd néanmoins un peu de sa force dans son épilogue. Et c'est dommage.
FOSTER CHILD (JOHN JOHN) de Brillante Mendoza
Thelma vit dans un bidonville de Manille avec son mari et ses deux fils et le petit John-John, qu'elle élève depuis trois ans et qui s'apprête à être adopté par un couple d'Américains friqués. Le film raconte la dernière journée de Thelma et des siens avec John-John, le petit métis à la gueule d'ange...
Pas de grands événements ici, à part le déchirement de la séparation annoncée. Disons : pas de grandes péripéties. Du coup, le film manque de rythme et est parfois un peu ennuyeux. Le film a, au moins dans sa première partie, quelque chose de documentaire, notamment dans sa description du bidonville, particulièrement dans cette scène hallucinante où l'on suit l'un des personnages du film, Bianca, qui traverse tout le bidonville, soit un dédale sordide de ruelles impraticables aux « maisons » misérables. Une réalité inimaginable, même si on sait vaguement à quoi peut ressembler un bidonville... Le choc sera grand pour Thelma lorsqu'elle découvrira le luxueux hôtel où séjournent les parents adoptifs de John-John... Notamment la salle de bains... Le choc de ces deux réalités-là (l'extrême pauvreté, l'extrême richesse) est terrifiant. Voilà le monde dans lequel on vit. Et puis difficile évidemment de ne pas être bouleversé par la fin du film... Pensez donc : un enfant que vous avez élevé (aimé) pendant trois ans...